Chaque début de nouvelle année voit se dérouler, dans nos communes et municipalités, la traditionnelle cérémonie des voeux truffée de discours plus ou moins protocolaires, en présence d'un auditoire choisi et trié sur le volet ("forces vives"), tous les autres citoyens-administrés ("forces mortes" et donc non invitables) se contentant d'en grappiller les quelques échos dans le "chournal" du lendemain.
C'est aussi l'occasion, pour les afficionados branchés fashion, de mater les atours vestimentaires de nos édiles : costume de couleur sombre de préférence (en lin, coton ou laine peignée), mis-bas en fil d'Ecosse assortis et souliers vernis pour les messieurs, écharpes distinguées (en soie, cachemire, laine, coton, velours ou pashmina), modèles "bleu Colombey" ou "rouge Jarnac" pour les dames, sans oublier les tenues élégamment sportives, vestes de cuir et col décontracté pour les plus affranchis.
Ceci posé et quelles que soient les tenues adoptées, masculines et a fortiori féminines*, toutes dérogent, à l'examen, aux dispositions "légales" encore en vigueur à cet égard...
En effet, le très sérieux guide du Statut de l'élu local (60 pages), édité par l'Association des Maires de France (AMF) et régulièrement mis à jour, comporte toujours dans son édition 2011 une recommandation vestimentaire millésimée... 1852 !
Ce n'est certes pas le style de littérature que S'Molshemer blog conseillerait de parcourir en dilettante, blotti au coin de feu, mais le paragraphe consacré au "Costume de maire" (page 47 - Ch. XI : "Les attributs de fonction") vaut franchement le détour et son pesant de cacahuètes.
Coup d'oeil : "Les textes régissant les attributs matériels de la fonction de maire et de conseiller municipal sont fort anciens. Le port du costume de maire reste pourtant en théorie obligatoire dans les cérémonies publiques et « toutes les fois que l’exercice de la fonction peut rendre ce signe distinctif de son autorité » en vertu de l’article 2 du décret du 1er mars 1852.
Au titre de ce décret, le costume officiel se compose :
- pour les maires (*hommes exclusivement, "normal" vu l'époque précitée, ndlr), d’un « habit bleu, broderie en argent, branche d’olivier au collet, parements et taille, baguette au bord de l’habit, gilet blanc, chapeau français à plumes noires, ganse brodée en argent, épée argentée à poignée de nacre, écharpe tricolore avec glands à franges d’or. Petite tenue : même broderie au collet et parement » ;
- pour les adjoints au maire (*hommes toujours, ndlr), « coins brodés au collet, parement, taille et baguette. Petite tenue : coins au collet et parements, écharpe tricolore à franges d’argent ».
Le guide précise à ce sujet que, certes tombé en désuétude (mais non abrogé à ce jour), ce décret du 19e siècle est de fait toujours en vigueur.
Dans l'attente de son officielle et tardive abrogation, on attend avec une indiscrète curiosité les cérémonies municipales à venir, ordonnancées en ces costumes d'opérette d'apparat, mais encore faudra-t-il jouir d'ici là du (relatif) privilège d'y être convié...